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Les oiseaux du Pô...en avril 2002, suite et fin !

Mardi 16 Avril (90 kms)
Nous sommes réveillés par le ron-ron d'une armada de bateaux de pêche tirant des filets 
à proximité du rivage. Peut-être la cueillette de " l'or du delta ", les palourdes.
Promenade matinale sur une plage déserte. Chaque " paillote ", bar-restaurant possède son tracteur nécessaire au ratissage de son bout de plage privée.
Le bois environnant résonne des roucoulements des Pigeons ramiers (Columba palumbus), 
au sommet d'un arbre le Bruant zizi (Emberiza cirlus) pousse sa trille, le Rouge-gorge familier (Erithacus rubecula) fait entendre ses courtes phrases cristallines. 
Les cris du Pic épeiche (Dendrocopos major) retentissent.
Tout un peuple ignoré de la plupart des passants.

Prochaine étape, Comacchio, petite ville reliée à la terre ferme depuis 1821.
Cette ville construite sur des petits canaux parsemés de canards en plastique, nous permet 
de renouer quelque temps avec l'espèce humaine. 
De nombreux jeunes en vadrouille animent les quais et les ponts, sous le soleil.
Durant l'après-midi, nous parcourons les abords du lac, les routes et chemins des Valli (marais) de Comacchio, au sud de la ville. Ces platitudes cachent des trésors ornithologiques, et le ciel menaçant ne nous empêche pas de profiter du spectacle de la nature.

Au fil de notre parcours, et en direction d' Argenta, voici quelques espèces observées.
La Sterne Hansel (Gelochelodon nilotica) au bec noir terminé d'une pointe de jaune.  
Les Alouettes des champs (Alauda arvensis) qui autrefois abondantes voient leurs effectifs diminuer peu à peu, le Courlis cendré (Numenius arquata) au long bec recourbé, 
le Tarier pâtre (Saxicola torquata) souvent perché, les Canards colverts (Anas platyrhynchos) présents partout, les Hirondelles rustiques (Hirundo rustica) revenues depuis peu d'Afrique.
Et le Busard cendré (Circus pygargus), le " baron gris ", dont la légèreté en vol est surprenante. Il survole à faible altitude les prés pour rechercher ses proies. Malheureusement, il choisit souvent pour faire son nid les champs de céréales, les prés qui seront fauchés … et il ne doit, en de nombreux endroits, sa survie que grâce à des bénévoles qui les surveillent. 
En cas de danger, ces " bergers des busards " doivent intervenir et déplacer les nids 
dans des lieux plus sûrs.

Une réserve naturelle, Zavelca, , pourvue d'un observatoire nous permet d'admirer à loisirs 
les Échasses blanches (Himantopus himantopus). 
Quel oiseau fin et élégant, au plumage noir et blanc, sur ses hautes pattes rouges !

Puis direction, Argenta, pour une courte balade citadine. 
Une aire de service pour camping-cars à Campotto Del Po, mais fermée pour cause de travaux
Nous rejoignons la réserve naturelle, Stazione Campotto di Argenta : à notre arrivée un guide accompagne un groupe d'adolescents qui reviennent de leur promenade dans la réserve. 
Nous échangeons quelques renseignements, puis nous nous installons sur le parking désert, sous une pluie fine.

Bottes indispensables, pour le tour de la réserve humide. Mais superbe, principalement composée de deux plans d'eau. Nous y trouvons une dizaine d'Oies cendrées (Anser anser), quelques Sarcelles d'hiver (Anas crecca).
Les Hirondelles de rivage (Riparia riparia) frôlent la surface de l'eau alors que dans la roselière s'égrènent les notes grinçantes du chant des Rousserolles effarvates (Acrocephalus scirpaceus). Au moins quatre Coucous gris (Cuculus canorus) se répondent de leurs perchoirs. 
La bonne surprise nous est offerte par un adulte de Grue cendrée (Grus grus) accompagné de deux juvéniles, oiseaux nés l'année précédente. Un Pélican blanc (Pelecanus onocrotalus) fréquente, en solitaire, la réserve depuis 6 ans. Les Canards souchets (Anas clypeata) au long bec aplati en spatule, et les Canards chipeaux (Anas strepera) se préparent pour la saison 
de reproduction.
Nous passons un long moment, perchés sur un observatoire, à observer les Ragondins (Myocastor coypus) alors que le grésillement d'insecte de la Locustelle luscinoïde 
(Locustella luscinoides) trouble à peine le silence.
A notre retour, un mâle de Héron bihoreau ( Nycticorax nycticorax) branché sur un arbre mort, veille à proximité de notre véhicule de loisirs.

Une réserve naturelle rien que pour nous, avec quelques règles de conduite :
- ne pas déranger, être discret
- ne pas faire de bruit
- respecter l'environnement
- dialoguer avec les personnes rencontrées

En retour, des satisfactions !
Le soir, quelques pêcheurs s'installent au bord des canaux munis de lampes électriques : 
pêche à la grenouille ? 
Superbe nuit, bercés par une petite pluie, sous les ailes de petites chauves-souris.

Les marais d'Argenta, s'étendent sur 1 600 hectares et constituent une zone humide importante pour la reproduction des oiseaux d'eau. On y trouve encore de belles roselières, et les Nénuphars parent les plans d'eau. Nous y avons cherché, sans succès, l'Utriculaire commune (Utricularia vulgaris), plante carnivore dont les feuilles immergées sont de véritables pièges 
pour les petits insectes aquatiques. C'est aussi un des rares endroits d'Europe où niche 
la Guifette moustac (Chlidonias hybrida) de la famille des sternes.

Mercredi 17 Avril (280 kms)
Matinée animée par le gazouillis des oiseaux, qui au réveil s'en donnent à cœur joie. 
Chant monotone et éraillé du Verdier d'Europe (Carduelis chloris) au sommet d'un arbre. 
Marche lente du Crabier chevelu (Ardeola ralloides) à la recherche de grenouilles.
Après quelques détours, dont le Musée des marais d'Argenta, nous prévoyons de rejoindre 
la mer méditerranée : autoroute, où nous déboulons vers Bologne, nous frôlons Florence pour enfin nous poser à Pise, sur le fleuve Arno que les cruciverbistes ne peuvent pas ignorer.
Allez savoir pourquoi, cette tour inclinée, fait partie de ces monuments que nous désirons voir absolument !

Dès que nous apercevons le haut des 59 mètres de la Tour penchée, première rue à droite 
où un stationnement nous attend. Durant les quelques centaines de mètres qui nous séparent 
du monument, nous l'apercevons entre les maisons et les immeubles : elle penche !

Mais, et c'est une surprise, sur la piazza del Duomo, le Campanile n'est pas seul : c'est un ensemble de trois édifices blancs, sur le tapis vert d'une pelouse, qui réfléchissent les rayons d'un soleil enfin de saison.
La vaste cathédrale du XIème, le Baptistère et enfin les 8 rangs de colonnes superposées 
de la Tour. 

La première pierre de la tour fut posée en 1173 et dès 1274 par suite d'un affaissement du terrain sablonneux, la construction penchait déjà ses trois niveaux. En 1301, 7 niveaux et un dernier fin du XIVème siècle. 28 millions d'Euros furent nécessaires pour redresser de 43 centimètres 
la " torre pendante ", et 2080 ne verra donc pas l'écroulement de l'édifice comme le prévoyaient les calculs. L'escalier en colimaçon qui mène au sommet a 294 marches, de quoi admirer 
la vieille ville de haut. Fermée au public depuis 1990, la tour est de nouveau accessible depuis l'année dernière (on estime qu'elle est sécurisée pour près de 300 ans).



Les oiseaux, qui ne connaissent rien, ou du moins s'en moquent, aux lois sur la gravité, survolent les touristes affalés sur l'herbe tendre. La ville de Galilée, nous enchante par son animation : et pourtant, la tour, elle penche !
Les boutiques qui longent la place proposent aux touristes pratiquement toutes les mêmes souvenirs estampillés Pisa. 
Ca se bouscule gentiment, c'est coloré, ça parle dans toutes les langues.

Bon, c'est que l'on est pas d'ici, nous ! Il faut reprendre la route pour une réserve naturelle 
située au bord de la mer Méditerranée : l'Oasi de Massaciuccholi.
A l'entrée de la réserve, la maison tenue par la LIPU (Lega Italiana Protezione Ucelli, 
la Ligue Italienne pour la protection des oiseaux). A notre arrivée, le responsable est absent : nous visitons l'exposition qui présente la nature de ces lieux. Puis nous partons pour la réserve, promenade au dessus de l'eau et parmi les roseaux grâce à des planches sur pilotis qui mènent vers les observatoires. Nous prenons notre " quatre-heures " au calme, à quelques mètres 
des Fuligules milouins (Aythya ferina).

Comme chaque soir, nous partons en quête de notre " reposoir " : direction la " Mar Ligure ", pas très loin de là, vers la Marina Torre del Lago … en pleine construction. Après quelques dizaines de mètres sur le chemin sablonneux nous garons notre Camping-car sur un terreplein pour admirer le coucher de soleil sur la méditerranée. 
Les dunes sont parsemées de détritus et de petites fleurs roses.
Soirée, troublée par d'étranges rendez-vous nocturnes de quelques voitures … bizarre !

Jeudi 18 Avril (320 kms)
Lever plus tôt que prévu : coup de Klaxon, Toc ! Toc ! ce sont les carabinieri qui nous expliquent que nous sommes sur le terrain d'entrainement des militaires. Ils nous montrent le panneau 
situé à quelques mètres de nous, et cela suffit comme commentaires. 
On nous laisse 10 minutes de répit avant la guerre !
Nous nous rendons au Bar voisin, en croisant une armée en tenue, pour un petit déjeuner succinct, ignorés par un tenancier de mauvaise humeur ! Pour certains le matin est un chemin 
de croix ! Les carabinieri viennent prendre un café, et au cours d'une discussion gestuelle, 
nous comprenons que nous avons au moins un " Rimor " en commun.
Deux Mésanges charbonnières (Parus major) nourrissent des jeunes affamés. 
Au sommet d'un buisson, un Serin cini (Serinus serinus) égrène ses trilles sonores. 
Une bande de Pigeons ramiers (Columba palumbus) passe en rasant les dunes.

Nous décidons de prendre un peu d'altitude, en parcourant les petites routes de Alpi Alpuane, petit massif montagneux au nord de Pise. Beaux paysages, mais routes en travaux, énormes camions chargés d'éboulis, à chaque virage on se demande qui on va croiser. 
Plein d'eau à la fontaine de Vagli et pause en surplomb de Lago di Vagli, retenue d'eau artificielle. Passages de camions, transportant de gros blocs de marbre de Carrare ( ?).
Deux Buses variables (Buteo buteo) paradent en plein ciel, décrivant de larges arabesques. 
Une Coronelle lisse (Coronella austriaca), couleuvre inoffensive, se faufile à la poursuite des lézards des murailles. Sous un saule, un longicorne, Lamia textor, se hâte doucement.

Près de Roggio, dans un verger, un Pic mar (Dendrocopos medius) passe d'une cime d'arbre 
à l'autre. C'est sur ces dernières images que nous décidons d'entamer le trajet de retour.

Nous rejoignons l'autoroute A12, qui longe la mer, jusqu'après Gênes pour bifurquer vers 
le Nord sur l'A26 en direction d'Alessandria. C'est une succession impressionnante de tunnels, des files ininterrompues de poids-lourds tous plus pressés les uns que les autres : les ralentissements sont nombreux et être coincés entre deux camions citernes dans un tunnel, est un peu angoissant.
Nous quittons l'autoroute à Belforte-Monferrato, dans le Piemont, pour le Parc Régional delle Capanne di Marcarolo.

Le hasard nous amène vers un cul-de-sac, la petite route goudronnée se termine en chemin carrossable, où nous décidons de passer la nuit, charmés par le paysage et le silence.
Il est tard, le soleil se couche pour laisser place à la nuit étoilée et au sourire de la lune montante.

Vendredi 19 Avril (290 kms)
Après une nuit sans soucis, un petit-déjeuner sous les arbres, nous partons pour une petite marche, sous le soleil.
Le long du chemin nous redécouvrons la flore méditerranéenne avec l'Asphodèle blanc (Asphodelus albus) qui ne s'est pas encore épanouie. Les galles des Cynips du chêne 
(Cynips quercusfolli), petits hyménoptères au cycle de reproduction compliqué, ornent 
les feuilles des arbres. Le Lézard vert (Lacerta viridis) se chauffe sur un tas de bois mort. Superbe matinée de calme, sans rencontrer âme qui vive.

Et voilou !
Derniers instants italiens avant le retour, accompagnés du ricanement du Pic vert (Picus viridis).
Nous voulions terminer notre séjour en passant par le Col du Mont-Cenis : fermé pour cause d'enneigement !

Sur la route du retour en France, c'est au pied d'une petite chapelle, à l'entrée du village 
de Montaimont, au-dessus de La Chambre que nous passerons notre dernière nuit 
de ce périple Italien.

Samedi 20 avril (290 kms)
Montaimont en Savoie
Nous avons donc parcouru 1580 kms, pour découvrir une petite partie de l'Italie, 
où le Traité de Rome en 1957 instituait la Communauté Économique Européenne. 
Sept jours, c'est court, avec le sentiment parfois que l'on aura pas le temps de tout voir.

Quelques regrets :
- nous aurions été heureux de répondre à l'invitation de Maura … à la prochaine donc !
- nous n'avons rencontré aucun ornithologue ou naturaliste amateur comme nous : 
ce qui est d'ailleurs le cas lors de la plupart de nos escapades. 
Un seul pays dénote de la part de ses habitants un attachement à la nature : la Grande-Bretagne.
- le temps pluvieux, lors de notre séjour dans le Delta du Pô, ne nous a pas permis d'en découvrir toute la richesse ornithologique. 
Les migrations hivernales doivent y être intéressantes !


Loïc Rachel Yves


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